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Merdias et journalopes

Ils nous disent que les médias sont tellement de la merde qu'il faut les appeler des merdias”, et que les journalistes sont tellement des salopes qu'il faut les appeler des “journalopes”. Avec cette vulgarité injurieuse, ils croient que les mots-valises (les mots formés par la juxtaposition de deux mots) suffisent à justifier leur dénigrement.

Ils ne nous autorisent pas à penser par nous-mêmes, et si nous avons un désaccord avec eux, ils disent que c'est à cause des “merdias” qui ont perverti notre cerveau. Ils nous disent:

Ces attaques sont devenues très violentes, avec des insultes, des agressions physiques et des menaces de mort, à partir du mouvement des gilets jaunes. Cet article du HuffPost du 20 novembre 2018 l'explique très bien: ils ont également été traités de “youpins macronistes” (en référence à Patrick Drahi, propriétaire de plusieurs médias et qui dispose de la nationalité israélienne) et d'assassins, et ont reçu des menaces de mort sous forme d'images explicites, sans parler des incitations au meurtre telles que “paye-toi un journaliste”.

Image
        affichant: je suis menteur, je suis manipulateur, je suis
        falsificateur, je suis un assassin: je suis journaliste
        français
Insulte reçue par un journaliste sur Facebook en 2018 (source: article du HuffPost)

La vérité sur les mensonges des médias

Tous les dictateurs, toutes les sectes, essaient de contrôler les individus en coupant leurs réseaux d'information et d'entraide. Dans les sectes, on vous enferme loin des villes, sans moyen de transport ni argent, on vous dissuade d'utiliser le téléphone, on vous alerte sur les méfaits supposés de vos parents et de vos amis, et on vous incite à emprunter de l'argent à vos amis proches pour qu'ils coupent les ponts quand vous ne pourrez pas les rembourser. On vous interdit des lectures et on vous ordonne de lire la vérité du gourou aussi longtemps qu'il le faudra pour y trouver un début de logique.

Même si vous n'êtes pas sous l'emprise d'une secte, cela ne les empêche pas de vouloir contrôler vos pensées, en vous interdisant la majorité des sources d'information, dont la presse et les sites internet d'information, tenus par des journalistes professionnels qui vérifient leurs sources.

Des mensonges dans les médias, il y en a et nous y reviendrons, mais ce n'est pas le sujet principal.

Est-ce pour vous permettre de réfléchir par vous-mêmes? Non: c'est pour remplacer vos canaux habituels d'information par un ensemble d'autres canaux, tous branchés sur le même flux de mensonges. Ils appellent cela de la “réinformation” (en français normal on dit “mensonges”), en réalité c'est de l'emprise psychologique, au moyen d'une bulle informationnelle. Ils vous disent “informez-vous” (sous-entendu: sur internet, sur notre réseau Telegram, etc), mais ne vous informez qu'avec des mots-clés et des canaux qui vous renvoient systématiquement sur la même source de désinformation. Ils veulent vous imposer l'équivalent d'un pays où il y aurait de nombreuses stations de radio mais où toutes diffuseraient les discours du Président.


Exemple de bulle d'information: les liens du site Reinfo-Covid

Il y a plusieurs personnes qui veulent vous interdire d'écouter les médias (elles seront précisées dans d'autres articles): certains gouvernements étrangers, certains mouvements populistes français ou étrangers, des sectes et des religions voulant se développer, des pseudo-soignants qui vendent fort cher des remèdes ou thérapies miracles,... Leurs intérêts et donc leurs discours ne sont donc pas identiques, loin de là. Mais elles s'associent souvent pour attaquer les médias sérieux qui vérifient leurs informations, et plus généralement toutes les institutions publiques ou non (État, Union Européenne, médecins, climatologues, partis politiques, syndicats, associations, etc). Il s'agit de vous écarter de vos médias habituels pour faire de la place pour les médias de la bulle de “réinformation” (de désinformation). Il s'agit aussi de semer le doute dans votre esprit, dans le maximum de domaines possibles, pour faire disparaître vos repères intellectuels et faciliter votre insertion dans une bulle d'information qui diffuse des propos invraisemblables pour quiconque a une base solide de connaissances politiques, économiques ou scientifiques. Qu'ils veuillent vous convaincre que la Corée du Nord est une formidable démocratie ou que l'eau de javel est un anticancéreux miracle, ils doivent d'abord vous faire douter même de votre propre naissance: c'est un préalable indispensable pour que vous acceptiez leurs affirmations en concédant que “on nous cache tellement de choses”.

Pourquoi c'est dangereux

C'est dangereux car, inconsciemment, nous répétons et croyons ce que nous entendons. Ce n'est pas un signe de bêtise, bien au contraire: les humains apprennent en imitant, que ce soit pour marcher, pour parler, ou pour forger nos opinions religieuses ou politiques. Nous pouvons faire l'effort de penser autrement dans quelques domaines, par exemple d'être athée dans un pays intégralement chrétien ou musulman, mais l'effort est aussi important que de vouloir s'asseoir par terre en tailleur dans un pays où tout le monde utilise des chaises.

L'entrée dans une bulle d'information est progressive: nous doutons, nous cherchons à confirmer avec une autre source (que nous croyons indépendante de la première), et nous n'acceptons d'abord que des affirmations assez consensuelles. Pour cette raison, ils nous envoient des vidéos YouTube, très longues et avec un début assez insipide, pour que notre esprit critique soit engourdi au moment où ils délivreront leurs mensonges. Une fois que nous sommes piégés dans la bulle, nous devenons fermement convaincus d'affirmations tellement invraisemblables pour une personne extérieure que nous n'arrivons plus à communiquer avec les autres. Ils n'ont même plus besoin de nous interdire d'écouter les médias: nous ne supportons déjà plus les évidences du monde réel, tellement elles heurtent nos nouvelles croyances. En réalité, nous sommes mentalement entrés dans une secte.

Comment s'en sortir

Le meilleur conseil est de renouer des contacts à l'extérieur de la bulle informationnelle, par petites touches, sans chercher à convaincre autrui de tous ce que la bulle vous a inculqué, ni que personne ne tente vous faire renoncer d'un seul coup à tout ce qui a structuré votre pensée et votre vie pendant des mois ou des années.

Alors, les médias mentent-ils?

Oui, il y a des mensonges dans les médias, et aussi en-dehors des médias. C'est pour cela qu'en 1881, quand la liberté de la presse a été instaurée, des règles ont été fixées pour que le directeur de la publication soit pénalement responsable des éventuels délits, comme la diffamation. Un journal, une radio ou une télé qui ment prend donc quelques risques, tandis qu'un canal Telegram est intouchable quels que soient les mensonges que diffuse son propriétaire.

Il y a des médias qui négligent de vérifier si le ministre a dit la vérité au Parlement, si l'entreprise est aussi vertueuse qu'elle l'affirme, ou si le produit miracle est vraiment sûr et efficace: pas le temps, il faut aller si vite, et le journaliste n'est souvent pas compétent en économie, ou en sciences et médecine, il risque donc de diffuser les propos erronés d'une personne qui parle bien.

Il y a aussi des médias d'opinion, c'est-à-dire qui trient les informations et les interprètent pour les faire correspondre avec leurs grilles d'analyse: si rien n'est faux (théoriquement), les informations sont pourtant trompeuses. Si vous lisez Le Figaro, vous serez convaincus que la France est menacée par ses chômeurs paresseux et ses immigrés dangereux, tandis que si vous lisez l'Humanité, c'est le scandale des profits perçus par les grands capitalistes qui vous choquera.

Filtrer et analyser des informations est un acte arbitraire qui trahit forcément les opinions du journaliste, c'est inévitable. Mais on peut éviter de tomber dans une bulle informationnelle en diversifiant les sources d'information.

Enfin, il y a une recherche de sensationnalisme, pour “vendre du papier” ou accaparer l'attention: les faits ne sont pas mensongers, mais des faits insignifiants sont montés en épingle, ce qui peut relever d'une forme de manipulation.

Bref, comment éviter les mensonges

Contrairement à ce qu'ils vous disent, il ne faut pas cesser d'écouter les médias.
Au contraire, il faut diversifier vos sources d'information.
Collectivement, il faut lutter contre la concentration des médias.
Il est intéressant de limiter le temps de consultation des médias: “arrêter de regarder BFM”, simplement parce que les chaînes d'info en continu accaparent l'attention et font perdre du temps.

Demandez-vous si vous êtes tombé dans une bulle d'information: naviguez-vous entre plusieurs sources d'information qui vont toutes dans le même sens, au moins sur certains sujets, et affirment des choses que vos “amis d'avant” jugent farfelues? Il est temps de mettre le nez en-dehors de cette bulle et de consulter quelques sources d'information “normales”.

Si vous vous rendez compte qu'on vous parle avec des mots-valises injurieux comme “féminazie”, “journaputes”, “gauchiasse”, ou pire que vous vous mettez à utiliser vous-mêmes ce type de termes, il est urgent de prendre du recul car vous êtes devenu une cible pour l'extrême-droite. Alors déconnectez-vous des réseaux sociaux, reprenez le contact avec des personnes réelles et avec la nature, et réapprenez la langue française normale, celle qui permet de parler à des personnes sans les injurier, celle qui n'a pas but de désigner les boucs émissaires à exterminer mais qui permet d'exprimer toutes sortes d'idées enrichissantes.


Mots-clés: médias désinformation

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